PROFIL : Ramata Coulibaly de joueuse étoile à artiste-entrepreneure engagée
On peut dire de la carrière de soccer universitaire de Ramata Cissé, née Coulibaly, qu'elle n'était pas conventionnelle. Mais ce n'est qu'un point de vue parmi d'autres, et la recrue nationale de l'année 2004 continue de bousculer les conventions.
Depuis, elle a fondé sa propre agence de création, mettant à profit son expertise artistique pour alimenter la discussion sur la culture et la politique, favoriser la justice sociale, sensibiliser le public et transformer les attitudes. Son agence « est en constante croissance et évolution, comme moi-même », dit-elle.
Les parents de Ramata ont quitté la Côte d'Ivoire pour immigrer au Canada et élever leur fille à Ottawa. Avant de se joindre aux Gee-Gees en 2004, elle a voyagé partout dans le monde. En 10e année, l'étudiante de 5'10" de l'école secondaire Louis-Riel a percé comme mannequin, prenant part à des défilés de mode à Paris, Milan et New York.
Recrutée par les Gee-Gees dès sa sortie du secondaire, elle a égalé un record d'équipe avec 12 buts en 12 matchs, menant la ligue au chapitre des buts. Elle a été nommée recrue de l'année de SIC. « J'ai toujours su, au fond de moi, que je reviendrais un jour au soccer; quand Steve m'a approchée, il m'a en quelque sorte donné ma réponse. C'était le coup de pouce dont j'avais besoin; j'ai saisi l'occasion et intégré l'équipe. »
« Le soccer m'a appris la discipline, la combativité, la persévérance et le travail d'équipe. C'était un endroit où je pouvais lâcher prise pendant 90 minutes et oublier mes soucis dans ce monde idéal où tout le monde travaille vers un objectif commun, et quand on gagne, on sait que c'est mérité. »
Au printemps 2005, Coulibaly a aussi été nommée joueuse étoile de l'équipe de soccer intérieur, mais dès l'automne suivant, son temps au sein des Gee-Gees était compté. « Pendant mon passage dans l'équipe, j'ai été impressionnée par la discipline et la combativité de mes coéquipières. Grâce à elles, j'ai acquis des compétences pour la vie. J'ai transposé les normes élevées des Gee-Gees dans ma vie professionnelle. »
Elle est revenue au monde de la mode après sa saison de soccer, travaillant éventuellement à Shanghai, en Chine; en 2014, elle était la seule mannequin noire à avoir signé avec une agence là-bas. Ces années furent des plus formatives. En 2013, elle a cofondé Flofferz, une agence de création qui a travaillé avec des entreprises de renom, dont Adidas, Vogue Russie et Samsung.
« Notre mission est de favoriser la diversité culturelle et l'égalité des sexes, et de faire connaître des œuvres de bienfaisance et organismes internationaux. La créativité et le développement de concepts sont au cœur de notre évolution. »
Elle travaille actuellement sur un projet conceptuel culinaire contemporain, Chez Ramata, qui consiste en une série de recettes non conventionnelles alliant culture et patrimoine. « Née au Canada de parents ivoiriens, j'ai remarqué qu'en Côte d'Ivoire beaucoup de nos systèmes sont encore réprimés, conséquence des traumatismes de la colonisation. Les gens ne se rendent pas compte des conséquences dans leur vie quotidienne. J'ai commencé à explorer davantage cette dichotomie dans le cadre de mon récent projet. »
Cissé vivait à Abidjan, en Côte d'Ivoire, quand la pandémie a frappé. Elle est récemment revenue à Ottawa, où elle espère maintenant rallier la communauté artistique. Son expérience sportive lui a montré ce que peuvent accomplir les gens lorsqu'ils unissent leurs efforts.
« Ce que j'ai aimé [dans le soccer], surtout lors des tournois et de mon passage dans l'équipe provinciale de l'Ontario, c'est le caractère multiculturel des équipes. J'ai vu des gens de différents milieux culturels travailler ensemble vers un même but. »
« Ottawa sera toujours mon chez-moi; mes parents y ont immigré et j'y suis née. Tous mes proches sont ici. C'est l'un des endroits les plus cosmopolites et tolérants où j'ai pu habiter. Ayant grandi à Ottawa au sein d'une famille d'immigrants, et en tant qu'athlète, étudiante universitaire et artiste, j'ai pu constater les obstacles à l'acceptation et à la conscientisation. Maintenant que je suis à la maison, j'aimerais travailler avec les organismes de la région sur une variété de programmes qui nous aideraient à mieux nous comprendre en tant que ville multiculturelle. »
« Je pense que le moment est venu pour la ville de créer plus d'espace et de programmes pour de nouveaux concepts créatifs. J'aimerais réunir des artistes accomplis de différents domaines, aussi atypiques soient-ils, et discuter de leurs projets pour apprendre les uns des autres. Nous avons la possibilité de le faire, et je pense que cela pourrait nous faire évoluer davantage en tant que ville. »
Voilà une vision inspirante.